Ma voix, my weapon
** Content warning ** This article discusses sexual violence and its long-term impacts.
** Avertissement ** Cet article discute de la violence sexuelle et de ses effets à long terme.
This is a topic that is very close to my heart. It is also deeply personal. What is below are my stories (in the plural) of sexual violence and how I have overcome their long-term effects to become stronger than I ever thought I could be. Because it is so close to the bone I will start this article in my first language. English will follow. If you understand both languages you can read the whole thing — the two versions are not the same. Because I am aware of the statistics I know many of you reading this will also have suffered from sexual violence. I am sending love, light and strength to you and I invite you to get in touch if you think I can help you: bp@brigittepellerin.com.
La première fois que tu te fais violer tu penses que c’est de ta faute. J’ai 16 ans et je suis prisonnière de ma chambre. Si je crie, je suis encore plus dans la marde parce que François n’est pas supposé y être. Il le sait, évidemment. Et en profite.
J’aurais donc dû le savoir, aussi.
La première n’était pas une aggression particulièrement violente, et je dis ça sachant pleinement qu’il n’existe pas d’inconduite sexuelle qui ne le soit pas. Violer les limites de quelqu’un et leur imposer des actes sexuels contre leur volonté est naturellement violent, point à la ligne.
La seconde aggression, le soir de mon bal de finissants, était dans le même registre. Sans doute que sa consommation excessive d’alcool m’a un peu aidée. Je me rappelle clairement comment il s’est endormi en plein milieu. Et moi de rester là, complètement abasourdie par ce qui venait de se passer. Je n’avais pas vraiment d’expérience à cet âge, contrairement aux rumeurs qui circulaient. J’étais surtout fâchée d’avoir ça comme souvenir d’une soirée qui est supposée être mémorable pour des raisons plus joyeuses.
Le troisième viol a eu lieu une dizaine d’années plus tard, et est de loin le pire.
J’étais seule dans un bar du centre-ville de Montréal, et comme d’habitude je gardais un oeil vigilant sur mon verre parce qu’on a beau avoir plus d’expérience les petites pilules qui vous assomment sont partout et personne ne peut résister à leurs effets.
Ils étaient deux. Je n’ai jamais vu la pilule. Je ne me rappelle de rien sauf de m’être réveillée dans un endroit que je connaissais pas avec ces deux ordures mangeant de la pizza et se félicitant de leurs exploits qui, cette fois, m’avaient laissée avec des douleurs que je ne pouvais ignorer.
Ces drogues vous laissent dans un état lamentable. J’étais complètement étourdie et confuse, et j’avais un besoin urgent d’air frais. Je me suis enfuie sans demander mon reste.
Appeler la police? Pourquoi? Pour avoir à revivre ce drame des douzaines de fois et arriver à pas grand chose finalement parce que c’est tellement rare que les violeurs soient punis. Surtout que l’un des deux se disait fils de diplomate. Je me suis contentée de m’assurer n’avoir aucune séquelle physique à long terme — je n’étais pas enceinte et n’avais rien chopé.
Mais sacrament que j’ai appris ma leçon.
Je vous déballe tout ça pour une bonne raison. Le projet de loi S-12, parrainé par le sénateur Marc Gold, a reçu la sanction royale le 26 octobre. Il modifie le Code criminelpour ne pas criminaliser une victime d’actes sexuels qui ignore une ordonnance de non-publication… qui est en place pour sa protection.
Ce projet de loi a vu le jour après qu’une femme de Kitchener, dont l’ex avait été reconnu coupable d’aggression sexuelle à son endroit, ait partagé le jugement de la Cour avec quelques proches. Son ex — celui qui venait d’être reconnu coupable d’aggression sexuelle, vous vous en souvenez — s’est plaint et la victime a été reconnue coupable d’avoir violé l’ordonnance de non-publication. La Cour d’appel a renversé ça et maintenant avec la modification au Code criminel une telle aberration n’arrivera plus.
Je tiens à souligner l’excellent travail de LEAF dans ce dossier — et bien d’autres d’ailleurs, comme les violences facilitées par la technologie.
Une ordonnance de non-publication est là pour protéger la victime parce qu’on sait que dans cette société on blâme facilement les victimes d’inconduite sexuelle. Et même si on ne le faisait pas, on n’est pas pour imposer aux victimes d’être identifiées contre leur gré, parce que ça ne ferait que les re-traumatiser. Et c’est sans compter les cas où la victime a des enfants, qui souffriraient si toutes les informations étaient rendues publiques.
Cependant, certaines personnes ont besoin de parler de ce qui leur est arrivé. En thérapie, par exemple. Ou avec des proches. Ou ailleurs. On ne devrait pas les criminaliser pour ça, il me semble que ça devrait être évident.
Personnellement, ça m’a pris beaucoup de temps avant d’être prête à parler de mes expériences, même avec des proches. Ce que j’ai trouvé cependant, c’est que d’en parler m’a beaucoup aidée à panser mes plaies et à guérir, finalement. Même qu’aujourd’hui je milite pas mal fort en me servant de mon expérience pour aider d’autres personnes. C’est mon histoire et elle m’appartient. J’en fais ce que je veux et si quelqu’un a un problème avec ça il peut venir me le dire en pleine face, une option que je ne recommande pas.
Ma voix est une arme très puissante, et c’est souvent pour cette raison que la société décourage les victimes d’inconduite sexuelle de parler ouvertement de ce qui leur est arrivé.
Moi je refuse de me taire. Parce que plus on parle de violence sexuelle, plus on force les gens à prendre conscience de l’ampleur du fléau.
Pour l’éradiquer, on a besoin de tout le monde, surtout des hommes. Ils n’aiment pas ces histoires parce que ça les blesse de savoir combien de femmes souffrent à cause des abus d’une minorité de trous de cul. C’est justement pour ça qu’il faut continuer de rendre ces histoires publiques. Et de les répéter aussi souvent que nécessaire.
It’s amazing how quickly you can blame yourself when you get raped. That’s especially true if you’ve been raised to believe that bad things don’t happen to good girls.
Yeah, about that.
For a long time I believed I’d contributed to mine. In the plural, starting at 16 in my own bedroom, at prom night and then about a decade later in downtown Montreal. That one was especially nasty and physically violent and involved spiking my drink. Oh yes, I was careful not to let my drink out of my hand. I’m not an idiot. But there were two of them and they managed to distract me. Dropping a tiny pill in a glass doesn’t take long. Evidently I wasn’t these turds’ first victim.
I was lucky to escape with no permanent injuries, not pregnant and mercifully free of infection. I learned that being good offers no protection.
It took me a long time to be able to talk about my experiences, even with people who are close to me. Maybe that’s because it took a long time to be comfortable enough in my own skin to have close friends I could trust, to say nothing of being capable of accepting a loving, healthy relationship. A rape isn’t just a physical thing, you know. It fucks with your head, too.
Once I started opening up, I found that talking helped me heal — and more than that, it helped me become stronger than I ever thought I could be. That’s why I’m a huge advocate for victims’ right to share their stories, and whenever possible I help them do that.
The reason I’m telling you all this is that on October 26, Bill S-12, sponsored by Senator Marc Gold, received royal assent. It modifies the Criminal Code to avoid criminalizing a victim of sexual misconduct for sharing details of their own case.
This bill came in response to a case from Kitchener. A woman whose ex-husband had been convicted of sexual assault against her defied the publication ban by sharing the Court’s ruling with loved ones. The ex — that’d be the asshole who’d just been convicted of having sexually assaulted her, you remember — complained that she was violating the publication ban put in place to protect her.
Pause here for a massive shoutout to LEAF for its incredible work on this file — and other files, too, including technology-assisted gender-based violence.
Stories of sexual abuse belong to the victims, who can do what they want with them for any reason. Nobody else has a say over this.
Being public with stories of sexual misconduct is a powerful weapon in the fight against this scourge. That’s why victims are constantly discouraged from sharing them. It’s uncomfortable, at best, to hear these stories. I get it. But not sharing them allows everyone to ignore the problem, and that won’t do.